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Depuis quelques années, le private equity a clairement eu le vent en poupe auprès des investisseurs particuliers et les offres à leur disposition ont fleuri comme les tulipes au printemps. Mais la hausse des taux a pu semer quelques doutes depuis. Les statistiques de PitchBook montrent certes une année 2023 où les levées de fonds dans le private equity en Europe ont flirté avec le record de 2021, avec un chiffre estimé à 117,8 milliards d’euros . Mais le nombre de fonds non cotés ayant levé de l’argent auprès des investisseurs institutionnels a lui aussi atteint un plus bas pour la décennie. L’engouement pour les actifs privés demeure, mais semble plus sélectif. Dans une période où la classe d’actifs n’est plus poussée par le vent de la baisse des taux, les investisseurs particuliers, qui restent souvent peu expérimentés dans cette classe d’actifs elle-même encore jeune, doivent conserver la tête froide. Voici trois conseils pour investir dans les actifs non cotés :
Les investisseurs habitués à la bourse sont souvent préoccupés par la recherche du bon point d’entrée, craignant tout à la fois de manquer le prochain mouvement haussier et de s’exposer juste avant une baisse brutale. Avec les actifs non cotés, ils doivent perdre ce biais. D’abord, en private equity, il n’y a pas de valorisation quotidienne des actifs. Certes, le prix des ‘deals’ en non coté n’est jamais totalement indépendant des fluctuations boursières, puisque la valorisation des sociétés cotées fournit des points de comparaison. Mais le point important à garder en tête est que l’argent confié à un fonds non coté ne va pas être investi immédiatement. Au contraire, la phase d’investissement, qui peut s’étaler sur quatre ou cinq ans, laisse une latitude importante au gérant pour décider d’investir ou non dans les dossiers qui lui sont proposés et donc de passer son tour dans les périodes où les valorisations lui semblent excessives. Ce lissage naturel des points d’entrée en private equity ne doit pas empêcher les investisseurs de constituer progressivement leur allocation et en la répartissant dans des stratégies différentes. Mais, plus que le « market timing », ce qui importe vraiment lorsqu’on investit en acceptant d’immobiliser son argent sur du long terme, généralement une dizaine d’années, c’est de s’exposer à des entreprises leaders sur leur marché, donc bénéficiant d’un potentiel de croissance important à travers les cycles. La détérioration du climat macroéconomique sur les derniers mois, la hausse de l'inflation et des taux d'intérêts ainsi que les menaces géopolitiques, amènent les investisseurs et leurs conseillers à évoluer dans un environnement de plus en plus difficile à appréhender où la sélection des équipes de gestion sera décisive.
Si le capital-investissement a un intérêt, c’est qu’en moyenne, l’accompagnement de PME ou d’ETI par des fonds est créateur de valeur. L’étude de France Invest publiée en décembre 2023 et portant sur 407 opérations de cessions d’entreprises par des acteurs français du capital-investissement entre 2012 et 2022 le démontre. En moyenne, la valeur des titres a été multiplié par 2,9 sur la période de détention de l’entreprise, qui est en moyenne de 5 ans et 5 mois. Les investisseurs doivent donc s’attacher à sélectionner les meilleures équipes de gestion, celles capables de faire mieux que cette moyenne plutôt enviable. L’historique de performance et la capacité qu’ont démontré certains gérants à s’adapter aux différentes phases économiques, y compris les périodes de crise comme 2008 ou le Covid, sont des éléments cruciaux. Plus que le bon moment, c’est le bon gérant qu’il faut savoir saisir !
Il n’est pas facile de prévoir l’avenir. C’est la raison pour laquelle la diversification d’un portefeuille entre différentes classes d’actifs est un élément essentiel. Si le non coté devient une brique de diversification de plus en plus essentielle pour les allocations de long terme, c’est en premier lieu parce que cette classe d’actifs ne cesse de gagner en importance relative. Ainsi, selon les chiffres de Pantheon International, le nombre de sociétés cotées en Amérique du Nord a reculé de 2,2% par an en moyenne entre 2010 et 2020, pour tomber à 11.391, tandis que le nombre de sociétés accompagnées par des acteurs de l'investissement non coté a au contraire bondi de 5,7% par an sur la même période, pour atteindre 16.850. La bonne nouvelle, c’est que cette expansion de l'univers du non coté s'est accompagnée d'une segmentation croissante. Il ne s'agit plus seulement de diversifier en ajoutant du non coté aux classes d'actifs classiques : les investisseurs ont également la possibilité de trouver de la diversification à l'intérieur même de la poche non cotée. Non seulement il faut diversifier en confiant de l'argent à différents gérants, mais il faut allouer à différents types de stratégies, à différents millésimes, à différentes géographies et même à différents types d'actifs. De la même manière que sur les actifs cotés, on peut avoir ici une approche de type cœur / satellite. Par exemple, on peut construire un cœur de portefeuille à base de stratégies de private equity co-investissant au côté de grands fonds ou de stratégies en secondaire, cette dernière option permettant d’accéder à des portefeuilles plus mûrs, donc de réduire la durée d’immobilisation des fonds. Ensuite, en complément, l’ajout de poches investies en infrastructures ou en dette privée permet de diversifier dans des types d’actifs moins risqués.
Comme dans les actifs cotés, l’adage consistant à ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier reste ici valide. C’est grâce à une bonne diversification des risques qu’on peut espérer générer des performances élevées et relativement régulières sur le long terme.
En matière d'investissement non coté, la notion d'accompagnement est cruciale, à tous les niveaux. D'abord, ce qui fait la qualité d'un gérant d'actifs non cotés, ce n'est pas seulement sa sagacité dans la sélection des meilleures entreprises, mais bel et bien sa capacité à les accompagner dans leur croissance, qu'il s'agisse de la conquête de nouveaux marchés à l'international ou du choix et de l'intégration d'acquisitions pour développer leur sphère de compétences.
Ensuite, les investisseurs ont besoin d'intermédiaires ayant une connaissance suffisamment fine des marchés privés pour les aider efficacement dans la sélection des meilleures stratégies et surtout en adéquation avec leur patrimoine existant, leur horizon d’investissement et leur degré d’aversion au risque. Il y a en effet une vraie valeur ajoutée dans la capacité à identifier les fonds en cours de levée de fonds, à comprendre dans le détail quel type d’entreprises ils vont financer (secteurs, géographies, taille d’entreprise, stade de développement des entreprises financées) et à évaluer la pertinence des stratégies proposées aux investisseurs en fonction des conditions de marché du moment. Le diable est parfois dans les détails et certains fonds sont susceptibles de s’ouvrir à une clientèle individuelle pour de mauvaises raisons, comme des difficultés à lever des fonds auprès des institutionnels. L’œil d’un expert du marché est essentiel pour opérer la bonne sélectivité.
Mais surtout, il est essentiel pour l’investisseur final de se faire accompagner par son conseiller financier pour constituer et faire évoluer son allocation dans ces classes d'actifs spécifiques. C'est lui seul, en tant que médecin de famille du patrimoine, qui a la vision globale des actifs, des projets, de la situation personnelle et familiale, et donc des besoins de son client. Tous ces éléments sont essentiels pour évaluer la capacité à supporter le risque, le type d'actifs à intégrer et la proportion du patrimoine que l'on peut dédier à des actifs illiquides.
Les actifs privés sont loin d'avoir dit leur dernier mot, mais la façon de les implémenter au sein d'une allocation globale est essentielle, si l'on veut obtenir un résultat à la hauteur des promesses.